Pour mémoire

1930. Le dahir berbère

Mis à jour : jeudi 13 janvier 2011 18:12
Le dahir berbère du 16 mai 1930 fut-il un événement fondateur du nationalisme marocain ou un phénomène instrumentalisé par les idéologues de l’arabisme ?
Le dahir berbère occupa dans l’histoire du Maroc contemporain une place polémique. Son étude nécessite que soient déconstruits les discours qui l’entourèrent afin de montrer la portée de leurs enjeux idéologiques.
Texte du dahir berbère
Louange à Dieu (Grand sceau de Sidi Mohamed)
Que l’on sache par les présentes - puisse Dieu en élever et en fortifier la teneur
Que Notre Majesté Chérifienne
Considérant
- que le Dahir de notre auguste père S.M. le Sultan Moulay Youssef, en date du 11 septembre 1914 (20 choual 1332), prescrit, dans l’intérêt du bien de nos sujets et de la tranquillité de l’Etat, de respecter le statut coutumier des tribus berbères pacifiées;
- que dans le même but, le Dahir du 15 juin 1922 (19 choual 1340) a institué des règles spéciales en ce qui concerne les aliénations immobilières qui seraient consenties à des étrangers dans les tribus de coutume berbère non pourvues de mahakmas pour l’application du chariâa;
- que de nombreuses tribus ont été depuis lors régulièrement classées par Notre Grand Vizir parmi celles dont le statut coutumier doit être respecté;
- qu’il devient opportun de préciser aujourd’hui les conditions particulières dans lesquelles la justice sera rendue dans les mêmes tribus.
A décidé ce qui suit :
Article premier : Dans les tribus de Notre Empire reconnues comme étant de coutume berbère, la répression des infractions commises par des sujets marocains, qui seraient de la compétence des caïds dans les autres parties de l’Empire, est de la compétence des chefs de tribus.
Pour les infractions, la compétence et la répression sont réglées par les articles 4 et 6 du présent Dahir.
Article deux : Sous réserve des règles de compétence qui régissent les tribunaux français de Notre Empire, les actions civiles ou commerciales, mobilières sont jugées, en premier ou en dernier ressort, suivant le taux qui sera fixé par arrêté viziriel, par les juridictions spéciales appelées tribunaux coutumiers.
Ces tribunaux sont également compétents en toute matière de statut personnel ou successoral. Ils appliquent, dans tous les cas, la coutume locale.
Article trois : L’appel des jugements rendus par les tribunaux coutumiers, dans les cas où il sera recevable, est porté devant les juridictions appelées tribunaux d’appel coutumiers.
Article quatre : En matière, ces tribunaux d’appel sont également compétents, en premier et dernier ressort, pour la répression des infractions prévues à l’alinéa 2 de l’article premier ci-dessus, et en outre de toutes infractions commises par des membres des tribunaux coutumiers dont a compétence normale est attribuée au chef de la tribu.
Article cinq : Auprès de chaque tribunal coutumier de première instance ou d’appel est placé un commissaire du Gouvernement, délégué par l’autorité régionale de contrôle de laquelle il dépend. Près de chacune de ces juridictions est également placé un secrétaire-greffier, lequel remplit en outre les fonctions de notaire.
Article six : Les juridictions françaises statuant en matière pénale, suivant les règles qui leur sont propres, sont compétente pour la répression des crimes commis en pays berbère, quelle que soit la condition de l’auteur du crime.
Dans ce cas est applicable le Dahir du 12 août 1913 (9 ramadan 1331) sur la procédure criminelle.
Article sept : Les actions immobilières auxquelles seraient parties, soit comme demandeur, soit comme défenseur, des ressortissants des juridictions françaises, sont de la compétence de ces juridictions.
Article huit : Toutes les règles d’organisation de composition, de fonctionnement des tribunaux seront fixées par arrêtés viziriels successifs, selon les cas et suivant les besoins.
Fait à Rabat, le 17 hija 1348 (16 mai 1930)
Vu pour promulgation et mise à exécution
Rabat, le 23 mai 1930
Le Commissaire Résident Général Lucien Saint