Vallée du Drâa

Le capitaine Georges Spillmann et la pacification du Drâa

Mis à jour : lundi 7 décembre 2015 11:08
Après un séjour de quelques mois à Rabat à la direction des Affaires politiques, Spillmann est chargé en janvier 1931, de créer le bureau d’Agdz, dans les Mezguita. Là, comme à Ouarzazate, la création du poste précède l’arrivée de la piste auto qui, malgré les prodiges du lieutenant Paulin, n’est encore qu’à Tazenakht.
Le Makhzen doit activer sa progression dans la vallée du Drâa car le général Giraud, commandant les Confins algéro-marocains, projette d’occuper à la fin de l’année les palmeraies du Tafilalet d’où, en conséquence, les Aït Hammou et les Aït Khebbache, adversaires acharnés de l’autorité du Sultan, vont être chassés et aller renforcer la dissidence aux abords du coude du Drâa.
Spillmann, qui vient d’être promu capitaine, pousse la construction des pistes.
Dès le tronçon Tazenakht - Agdz terminé, il engage les travaux vers Zagora. Mais l’itinéraire étant menacé par des djiouch provenant du jebel Sagho, il faut donc protéger les chantiers par les goums et les tirailleurs marocains. Le travail politique est également intense; le capitaine Spillmann, fin tacticien, a rapidement réalisé qu’il était vain de vouloir protéger les sédentaires Draoua contre les nomades Aït Atta, leurs suzerains de toujours. Il lui faut donc s’appuyer sur deux tribus favorables au Makhzen, les Aït Ounir et les Msoufa, puis rechercher à apprivoiser les Aït Isfoul, tribu dominante dans le Ktaoua.
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Méharistes du Draa
L’occupation de Zagora par un groupe mobile, aux ordres du lieutenant-colonel Chardon, chef du Bureau des A.I. de Ouarzazate, conjuguée avec celle du Tafilalet, se réalise en janvier 1932.
Comme prévu, la soumission du Tafilalet a pour conséquence l’arrivée des Aït Khebbache et des Aït Hammou au Ktaoua, où les Aït Isfoul ralliés au Makhzen, qu’il faut sans cesse renforcer en armes et en partisans, les contiennent difficilement. Le bivouac des 20ème et 25ème goums est même attaqué, dans la nuit du 5 mars, par un fort parti Aït Khebbache, aux ordres de Mohamed ou Bani. La riposte immédiate des goumiers entraînés par le lieutenant Gauthier, repousse l’assaut.
A peine arrivé à Zagora, Spillmann n’a qu’une idée, faire occuper rapidement le Ktaoua et le Mhamid el Ghozlane pour soutenir les tribus ralliées qui combattent sans arrêt les dissidents. L’opération est réalisée au milieu de novembre 1932 par le groupe mobile de Marrakech.
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Devant l’importance des effectifs engagés par le Makhzen, les tribus rebelles abandonnent définitivement le coude du Drâa et se réfugient en aval dans les immensités qui mènent à l’océan. Elles ne se soumettront qu’en mars 1934 lors de l’occupation de l’Anti-Atlas et de Tindouf qui terminera la pacification du Maroc.
Du Ktaoua, le groupe mobile Chardon remontera le Drâa et occupera les palmeraies de Nkob, de Tazzarine et du Tarhbalt, permettant la liaison au Sud du Sagho avec le groupe mobile des Confins algéro-marocains. La pacification de cette région du Drâa étant terminée, l’annexe de Zagora sera créée et bien qu’il soit jeune capitaine, le commandement en sera donné à Spillmann.
Draa_Mharistes_Ksar_At_Isfoul

Cette importante circonscription, outre Zagora, comprenait alors six bureaux ou postes :
- Agdz, dont le chef était le lieutenant Hubschwerlin qui avait le bon sens et les solides qualités d’un Alsacien;
- Tazzarine et Tarhbalt, que le capitaine Fignon et le lieutenant Monsigeon construisirent avec ardeur;
- Tagounit, chef : lieutenant de Saint-Bon;
- Le Mhamid, où s’installera le lieutenant Petit, un magnifique officier, qui sera tué le 23 février 1934 au combat de Tizi, au Sud de Tiznit, à la tête du 25ème goum. Ces postes seront chargés du contact avec les tribus nomades locales afin de préparer la marche sur Tindouf;
- Foum-Zguid où régneront les lieutenants Laennec et Kermadec, “officiers très bretons au service de la France”. La petite histoire raconte qu’ils faisaient hisser le dimanche, sur leur poste, l’Hermine de Bretagne.
Le lieutenant Laennec mènera avec clairvoyance, calme et ténacité, les négociations aboutissant à la reddition des dissidents du Sagho. Malheureusement, il mourra d’épuisement quelques jours plus tard, le 12 avril 1933.
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Source : Bel Madani Colonel :
Coupable de fidélité. Heurs et malheur de l’amitié franco-marocaine, NEL 1990


Jean Ravennes.
Extrait de : Aux portes du Sud - le Maroc. Ed. Alexis Redier 1931
Du confluent du Dadès et de l’Ouarzazate naît le Drâa, seul cours d’eau de l’Extrême-Sud qui ne se perde pas dans le bassin saharien. Après avoir déroulé dans le désert une immense avenue de palmiers, il bifurque, presque épuisé, vers la mer; fleuve dès lors en pointillé, souvent souterrain, ou dont on perd la trace. C’est dans ce groupe impénétrable d’oasis que, lançant parmi les tribus la nouvelle soudaine de son arrivée, le général Huré, commandant la région militaire de Marrakech, vint atterrir sans armes avec dix avions, en avril 1930. Audace qui, tout autant que les mystérieuses machines volantes, stupéfia vingt mille nomades accourus, pour égorger sans doute les téméraires si un seul appareil, en s’abîmant, leur avait montré les limites de notre puissance. Leur enthousiasme a répandu dans le désert un grand souvenir, mais il deviendrait vite inefficace si de réelles manifestations de force ne le soutenaient bientôt.
Régions difficiles, en effet, et sournoise. Sous les dattiers qui jalonnent les tranchées d’irrigation, sur la falaise rongée de trous bourbeux, où bougent des serpents rouges, les masures soudanaises sont comme les fenêtres des tribu nomades, où elles ont le droite de venir puiser l’eau.
Parcelles sévèrement gardées de jardins qui les nourrissent. Là les guerriers ennemis vivent côte à côte, à la source de tout bien, dans un qui-vive vite transformé en terribles batailles. On ne compte pas comme ailleurs la population d’un village au nombre des feux, mais à celui des fusils.
Oasis de grenades, des amandes et des pêches savoureuses; on y fabrique les pains de dattes pressées qui gardent à l’intérieur une fraîcheur exquise; on y tanne les beaux cuirs de filali pour Marrakech...

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